logo État 21logo État 21logo État 21logo État 21
  • État 21
    • Présentation
    • Équipe
    • Publications
    • Glossaire
  • Agroenvironnement
  • Cannabis
  • Entreprises publiques
  • Soutien à domicile
  • Nous contacter
✕
  • Accueil
  • Entreprises publiques
  • Nationaliser ou privatiser ? Entre les deux, plusieurs options possibles

Nationaliser ou privatiser ? Entre les deux, plusieurs options possibles

26 janvier 2021
Par Pascal Ricard

Doit-on nationaliser les CHSLD ? Faut-il privatiser la SAQ ? Contrairement à ce que l’on peut penser, entre ces deux grandes stratégies que sont la nationalisation et la privatisation, plusieurs options s’offrent à l’État pour lui permettre d’intervenir dans l’économie. Découvrez lesquelles dans ce continuum.
Preloader
  • Nationalisation

    En voir plus sur la nationalisation

  • Renationalisation

    En voir plus sur la renationalisation

  • État actionnaire

    En savoir plus sur l’État actionnaire

  • Partenariat public-privé

    Pour en savoir plus sur le partenariat public-privé

  • Privatisation partielle

    Pour en savoir plus sur la privatisation partielle

  • Privatisation

    Pour en savoir plus sur la privatisation



Nationalisation

La nationalisation est une forme d’interventionnisme économique par laquelle l’État prend en charge un secteur d’activité auparavant sous le contrôle du privé pour y exploiter commercialement un bien ou un service dans une perspective d’intérêt public. Historiquement, le phénomène est associé au 20e siècle et plus particulièrement au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, au mouvement de décolonisation et à la période des Trente Glorieuses (1945-1975). Au Québec, l’expression « Maître chez nous » de l’équipe du tonnerre du gouvernement de Jean Lesage (1960-1966) traduit bien ces idées de nationalisme économique et d’interventionnisme étatique qui légitiment le recours à la nationalisation à cette époque.

Les objectifs poursuivis lors d’une nationalisation sont multiples. L’État peut y avoir recours lorsqu’il considère l’exploitation et la gestion d’une ressource naturelle comme étant stratégiques et rentables (par exemple l’hydroélectricité). Il peut également la justifier par un enjeu de sécurité publique (tel que l’énergie nucléaire). La nationalisation est aussi privilégiée lorsque les infrastructures nécessaires sont trop coûteuses pour être assumées par le privé, on peut penser au développement d’un réseau ferroviaire à l’échelle d’un pays1.

La nationalisation n’est pas un phénomène appartenant au passé et constitue toujours un outil puissant des États afin d’intervenir dans des secteurs de leur économie jugés stratégiques. Par exemple, au Canada, le gouvernement libéral de Justin Trudeau a procédé en 2018 à la nationalisation de l’oléoduc Transmountain. Il s’agit d’un projet de pipeline visant à acheminer le pétrole de l’Alberta vers les ports du Pacifique en Colombie-Britannique afin d’en faciliter l’exportation sur les marchés internationaux. Le projet a été initié par l’entreprise privée Kinder Morgan, qui s’en est retirée en raison de l’opposition et des contestations judiciaires de la Colombie-Britannique et de nombreuses nations autochtones. Malgré ces controverses et le retrait de l’entreprise privée, le gouvernement fédéral a considéré cette infrastructure comme étant trop cruciale pour le secteur énergétique canadien pour qu’elle ne voie pas le jour et a donc procédé à sa nationalisation. À terme, l’accès aux marchés qu’assurerait cet oléoduc permettrait d’augmenter la capacité de production de l’Alberta de 300 000 à 890 000 barils de produits pétroliers par jour2.

Renationalisation

La renationalisation consiste en une opération où l’État reprend en charge une entreprise ou un secteur d’activité qui avait été précédemment privatisé. Il s’agit d’un phénomène assez récent et souvent lié à la faible performance de la gestion privée des entreprises privatisées pendant les décennies 1980-1990. Plusieurs de ces entreprises, en orientant l’ensemble de leurs décisions vers un objectif de stricte rentabilité, ont diminué la qualité de leurs services et ont parfois cessé de desservir certaines zones géographiques, ne répondant plus alors aux besoins de la population. Ces divers dysfonctionnements peuvent conduire l’État à renationaliser un secteur d’activité pour y atteindre des objectifs autres que seulement économiques.

Les coûts d’une renationalisation varient d’un secteur à un autre, mais ils demeurent toujours considérables. Pourtant, bien que la renationalisation corresponde à une logique clairement interventionniste, des gouvernements d’allégeances politiques diverses y ont eu recours. On peut penser au premier ministre du Royaume-Uni Boris Johnson, qui a, au moment de son entrée en poste en 2019, procédé à deux renationalisations alors qu’il est un élu conservateur3.

La renationalisation est en effet à l’ordre du jour au Royaume-Uni. Des sondages ont montré en 2017 que plus de 60 % de la population était favorable à cette opération dans les secteurs ferroviaires, de la gestion de l’eau, de la poste et de l’énergie4. L’une des renationalisations effectuées concerne les activités ferroviaires de la Northern Rail qui avait été privatisée dans les années 1990 et gérée depuis par Arriva, une filiale de Deutsche Bahn5. Le service offert par cette entreprise a été qualifié de cauchemardesque par le premier ministre Johnson. L’augmentation des tarifs pour les passagers a amené une baisse de l’achalandage et ainsi des revenus, entraînant une diminution subséquente des investissements dans les infrastructures, engendrant donc un mécontentement généralisé de la clientèle contribuant à une nouvelle baisse de l’achalandage6. Ce cercle vicieux a incité le gouvernement britannique à procéder à la renationalisation de la Northern Rail en 2020.

État actionnaire


L’État actionnaire renvoie à une situation où l’État investit dans une entreprise privée afin d’y avoir de l’influence sans pour autant en être le dirigeant principal ni le propriétaire. Cette participation de l’État, limitée à l’apport de capitaux, a gagné en popularité depuis les années 1980-1990 en réponse aux lacunes associées à la gestion étatique telles que des dépassements de coûts fréquents, une lourdeur dans les processus décisionnels et un manque d’efficience et d’efficacité7. En investissant dans diverses entreprises, l’État actionnaire cherche à encourager le développement économique national tout en faisant fructifier ses avoirs.

Le gouvernement québécois s’est doté de deux organisations publiques dont le rôle est ainsi d’investir dans différentes entreprises privées : Investissement Québec au niveau national et la Caisse de dépôt et placement (CDPQ) au niveau national et international. La mission de la première est d’investir dans des entreprises « de chez nous » pour stimuler l’économie québécoise, tandis que la CDPQ se préoccupe de la fructification de l’épargne de la population du Québec en investissant à la fois sur les marchés économiques nationaux et internationaux. Cependant, il arrive parfois que l’État actionnaire poursuive d’autres objectifs, comme ce fût le cas avec Bombardier en 2015.

Cette année-là, Bombardier accumulait d’importants déficits dans la C series, un programme controversé de construction d’avions commerciaux. L’entreprise avait des besoins urgents de liquidités afin de poursuivre ses activités, sans quoi elle risquait la faillite. Pour l’État, Bombardier représentait 3 300 emplois dans le domaine de l’aéronautique. La décision d’y investir 1,3 milliard de dollars par l’entremise d’Investissement Québec visait d’abord à préserver ces emplois et l’expertise dans le domaine plutôt qu’à rentabiliser son investissement. Le Québec ne fait pas bande à part avec ce type de décision. Plusieurs pays considèrent en effet l’intervention étatique « dans des opérations de sauvetage d’entreprises dont la défaillance présenterait des conséquences systémiques » comme faisant partie intégrante de la mission de l’État8.

Partenariat public-privé

Le partenariat public-privé (PPP) est une collaboration entre l’État et des entreprises privées afin de fournir un service, produire un bien ou réaliser un projet d’ordre public. Même si la première apparition de ce modèle, sans toutefois être nommé ainsi, remonte à 1880 en France, cette forme de partenariat s’est véritablement développée dans les années 1980 au Royaume-Uni dirigé par Margaret Thatcher9. Portée par des valeurs néolibérales, la « Dame de fer » cherchait à rationaliser l’État en appliquant des politiques de restriction des dépenses publiques, de privatisation et de réforme fiscale. Suivant cette logique, le partenariat entre le secteur public et privé offrait de nombreux avantages puisque les coûts, les risques et les revenus étaient partagés entre les acteurs impliqués alors qu’auparavant, les projets d’envergure étaient la responsabilité unique de l’État. Cela a permis un retrait progressif de l’État comme acteur économique central. Au Québec, le gouvernement de Jean Charest a impulsé plusieurs PPP dans les années 2000, qui faisaient partie intégrante de son dessein plus global de « réingénierie » de l’État.

Il existe quatre formes de PPP qui se distinguent en fonction de la durée du contrat, de la source de revenus, d’à qui incombe la gestion et de l’origine du capital économique (voir graphique ci-dessous). On y remarque que les ententes peuvent être très variées quant aux dispositions négociées par les parties concernées.
(Repris de Rouxel, 2006, p. 26)

Au Québec, le principal PPP choisi par l’État est la concession, particulièrement utilisée dans le secteur du transport10. L’autoroute 30 entre Châteauguay et Vaudreuil-Dorion, l’autoroute 25 entre Montréal et Laval, ainsi que le nouveau réseau d'aires de service en sont des exemples récents10. Ces projets ont été réalisés selon des critères déterminés par le ministère, mais dont la mise en œuvre relève de la responsabilité de l’entreprise privée. Au contraire des autoroutes publiques, ces tronçons sont payants et fonctionnent selon le principe d’utilisateur-payeur. L’obtention de ces contrats est encadrée par la Loi sur les contrats d’organismes afin de favoriser la mise en concurrence des entreprises et de s’assurer de la transparence des processus contractuels. Cela étant, ce mode d’octroi de contrat a ses limites et n’est pas à l’abri d’une corruption entre les acteurs du milieu comme l’a dévoilé la Commission Charbonneau en 201512.

Privatisation partielle

Une privatisation partielle se produit lors de la vente d’une part d’une entreprise publique à un ou des acteurs privés. Les États y ont généralement recours afin d’éliminer les déficits d’une entreprise publique causé par son inefficacité productive ou alors pour stimuler la croissance économique par l’afflux d’argent que permet la vente d’une partie de ses actifs13. De plus, la propriété partielle de l’organisation que conserve l’État lui permet d’y maintenir un certain contrôle sur sa gestion tout en se libérant de certaines dépenses. Depuis les années 2000, la privatisation partielle est devenue une option de plus en plus privilégiée par les États14.

À ce sujet, plusieurs recherches ont démontré que dans les années 2000, suivant la plus grande vague de privatisations des pays membres de l’OCDE, les gouvernements ont conservé tout de même le contrôle de 62,4% des entreprises privatisées15. C’est dans le secteur de l’énergie que les privatisations partielles ont été les plus courantes. Par exemple, en 2014, la Nouvelle-Zélande a privatisé près de la moitié des actions de sa plus grande entreprise d’électricité et la France s’est départie en 2017 de 16,6% d’Électricité de France (EDF) et de 71,3% d’ENGIE.

Un autre exemple récent de privatisation partielle dans le secteur de l’énergie est la vente en 2015 de 53 % des actions d’Hydro One, entreprise publique ontarienne responsable de la distribution d’électricité dans la province. La première ministre Kathleen Wynne a justifié la nécessité de cette privatisation partielle par l’important déficit public provincial (12,5 milliards de dollars) ainsi que pour dégager du financement afin de réaliser une promesse phare de sa campagne électorale, celle d’investir massivement dans le développement du secteur du transport et la rénovation du réseau routier.

Privatisation

La privatisation se définit par le transfert complet de la propriété d’une organisation publique vers le secteur privé. Ce phénomène est associé à la montée en puissance de l’idéologie néolibérale dans les décennies 1980-1990 avec comme figure de proue les politiciens Margaret Thatcher au Royaume-Uni et Ronald Reagan aux États-Unis. Le néolibéralisme prescrit un rôle réduit de l’État dans l’économie et une supériorité de la gestion du secteur privé. La privatisation d’entreprises publiques est ainsi conçue comme un gage d’une plus haute performance de l’organisation ainsi que d’une diminution de l’interventionnisme étatique. Comme démontré dans l’article Les partis de gauche nationalisent, les partis de droite privatisent ? Vérification des faits à partir du cas canadien, les privatisations sont d’ailleurs souvent initiées par des partis politiques d’idéologie conservatrice. En outre, elles génèrent une source de revenus importante pour des États souvent endettés.

L’une des plus récentes privatisations achevées au Canada est celle d’Ontera en 2014, une entreprise ontarienne du secteur des télécommunications. Cette ancienne société d’État qui fournissait un service de téléphonie, de données et d’Internet dans le nord de l’Ontario était une filiale de la Ontario Northland Transportation Commission (ONTC), également responsable de services d’autobus, de cargaisons ferroviaires et d'aménagement du territoire16. Le gouvernement a jugé qu’Ontera n’était plus rentable sur le long terme et a fait appel à des consultants externes afin de procéder à sa privatisation. Cela a toutefois mené à une indignation populaire : alors que l’entreprise publique était évaluée à 70 millions de dollars, sa vente à l’entreprise privée Bell fût conclue pour seulement 6 millions, engendrant une perte directe estimée à 61 millions de dollars canadiens17.


1 Abdelilah Hamdouch. (1989). Chapitre VI - Nationalisations : objectifs et désillusions de l’État d’influence | Cairn.info. https://www.cairn.info/l-etat-d-influence--9782876820340-page-165.html.

2 Agnès Chapsal. (2018). « Le controversé oléoduc Trans Mountain nationalisé par le Canada ». Le Monde. https://www.lemonde.fr/energies/article/2018/05/29/le-controverse-oleoduc-trans-mountain-nationalise-par-le-canada_5306519_1653054.html.

3 Alexandre Counis. (2020). Boris Johnson nationalise les lignes ferroviaires du nord de l’Angleterre | Les Echos. https://www.lesechos.fr/industrie-services/tourisme-transport/boris-johnson-nationalise-les-lignes-ferroviaires-du-nord-de-langleterre-1167387.

4 Jessop, Julian, et J. R. Shackleton. (2019). RENATIONALISATION: BACK TO THE FUTURE? IEA Current Controversies , no.72. https://iea.org.uk/wp-content/uploads/2019/12/CC72_Renationalisation-back-to-the-future_web.pdf.

5 Idem.

6 Gwyn Topham. (2020). « Northern Rail Renationalisation: Your Questions Answered ». The Guardian. https://www.theguardian.com/business/2020/jan/29/northern-rail-renationalisation-your-questions-answered.

7 Ibid.

8 Albouy, M. (s. d.). À quoi sert l’État actionnaire ? The Conversation. http://theconversation.com/a-quoi-sert-letat-actionnaire-70159.

9 Benjamin Rouxel. (2006). « Les projets de Partenariats Public Privé au Québec: Une étude de cas ». Université du Québec à Rimouski.

10 Transport Québec. (s. d). « Partenariat public-privé - Transports Québec ». Partenariat public-privé. https://www.transports.gouv.qc.ca/fr/entreprises-partenaires/entreprises-reseaux-routier/ppp/Pages/partenariat-public-prive.aspx.

11 Idem.

12 Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction. (2015). Rapport final — Commission d’enquête sur l’octroi et la gestion des contrats publics dans l’industrie de la construction. https://www.ceic.gouv.qc.ca/la-commission/rapport-final.html.

13 Tahar, H. (2011). Privatisation des entreprises publiques en Algérie. Géoéconomie, 56(1), 133-157. https://www.cairn.info/revue-geoeconomie-2011-1-page-133.htm.

14 Ouattara, K. (2018). Taxe environnementale et incitations managériales dans un duopole mixte. Revue économique, vol. 69(5), 723-744. https://www.cairn.info/revue-economique-2018-5-page-723.htm.

15 Idem.

16 Richard J. Brennan. (2015). Provincially owned telecom firm sold at loss of almost $61 million. Toronto Star. https://www.thestar.com/news/canada/2015/09/29/provincially-owned-telecom-firm-sold-at-loss-of-almost-61-million.html.

17 Idem.

Articles reliés

  • Les partis de gauche nationalisent, les partis de droite privatisent ? Vérification des faits à partir du cas canadien
  • Ligne du temps des nationalisations et privatisations au Canada 1900-2019

© État 21 - Glossaire - Publications - - - Par AàZ